Réflexions sur la compensation conventionnelle

  • Créé le : 05/12/2019
  • Modifé le : 09/12/2019

Comme l’indique l’article 1347 du code civil, « la compensation est l’extinction simultanée d’obligations réciproques entre deux personnes ». La compensation présente un avantage indéniable pour les deux débiteurs réciproques : elle produit un fort effet de garantie. Au lieu de payer sa dette et de réclamer le paiement de sa créance, chacun pourra, grâce à la compensation, éviter de payer, imputant en quelque sorte sa dette sur sa créance. L’intéressé ne court plus le risque de payer et de ne pas être payé. La compensation peut être envisagée sous trois formes (compensation légale, compensation judiciaire et compensation conventionnelle).

 

Nous étudierons deux difficultés liées à la clause de compensation.

L’effet automatique de la compensation conventionnelle

La clause de compensation peut stipuler de manière expresse l’automaticité de son effet, et ce de la manière suivante :

« Par application de l’article 1348-2 du Code civil, au cas où les parties seraient créancières l’une de l’autre, leurs créances se compenseront à hauteur de la plus faible des deux sommes, de plein droit sans qu’il soit nécessaire pour les parties de s’en prévaloir ».

L’intérêt de cette clause provient du débat interprétatif suite à la rédaction du nouvel article 1347 alinéa 2 du code civil. Alors que l’ancien article 1290 du Code civil prévoyait l’effet automatique de la compensation lorsque les conditions en étaient réunies, le nouvel article 1347 alinéa 2 du Code civil prévoit que la compensation « s’opère, sous réserve d’être invoquée, à due concurrence, à la date où ses conditions se trouvent réunies ».

Ce texte soulève une difficulté d’interprétation : signifie-t-il que la compensation ne joue que du jour où elle est invoquée (elle jouerait « de droit ») ou qu’elle continue de jouer automatiquement (« de plein droit ») mais qu’elle doit être invoquée par celui qui s’en prévaut ?

Le Rapport au Président de la République [1] semble conduire à retenir que désormais la compensation ne joue plus automatiquement et doit être invoquée.

L’effet unilatéral de la compensation conventionnelle

Dans ce schéma, la clause de compensation stipule qu’une compensation « de droit » s’opère qu’au bénéfice d’une partie, par exemple la tête de réseau, et que l’autre partie y renonce expressément, à savoir le distributeur :

« Au cas où les conditions de la compensation posées aux articles 1347 et suivants du Code civil seraient remplies, seul le Franchiseur pourra s’en prévaloir, à la différence du Franchisé, qui y renonce. »

De solution ancienne, cette clause a été considéré comme licite [2], mais il faut être prudent puisqu’au regard de l’appréciation croissante du déséquilibre dans les conventions entre les parties, elle pourrait avoir pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties (sur le fondement du droit commun – article 1171 du code civil et sur le fondement spécial – article L. 442-1 du code de commerce).

 

[1] Rapport au président de la république relatif à l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations

[2] Req. 11 mai 1880, DP 1880. 1. 470 : on peut renoncer aux effets de la compensation légale, soit par avance, soit après que cette compensation s’est accomplie ; Cass. civ. 1ère, 6 mai 1969, B. 166 : « la compagnie d’aménagement des Landes de Gascogne n’a pas demandé aux juges du fond de faire application de la compensation entre les sommes dues par chacune des parties et découlant des condamnations prononcées par la cour d’appel ; (…) la compensation, n’étant pas d’ordre public, ne peut pas être invoquée pour la première fois devant la cour de cassation »

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