Cass. com., 4 juillet 2019, n°18-10.077
Pour rappel, selon l’article L. 132-1 du code de la consommation (désormais L.212-1), dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
Dans cette affaire, un emprunteur a souscrit un prêt immobilier auprès d’une banque et a adhéré par l’intermédiaire d’un courtier à l’assurance de groupe souscrite par la banque auprès de l’assureur. L’emprunteur s’était porté caution solidaire du prêt, de même que la société.
A la suite d’incidents de paiement, la banque a prononcé la déchéance du terme et a vainement mis en demeure l’emprunteur et la caution de payer la somme restant due au titre du prêt.
Après avoir désintéressé la banque, la société a assigné l’emprunteur et la caution en paiement d’une certaine somme, ceux-ci ayant pour leur part assigné en intervention forcée la banque, l’assureur et le courtier. Les instances ont été jointes.
L’emprunteur a contesté et, devant le refus de garantie de l’assureur, a mis en jeu sa responsabilité et celle du courtier. L’emprunteur s’est fondé sur l’article L. 132-1 du code de la consommation (devenu L.212-2) considérant que cette limitation de la garantie était une clause abusive créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat d’assurance. En effet, il estime :
- d’une part, que la clause du contrat d’assurance qui oblige l’assuré en cas de sinistre à continuer lui-même le remboursement des échéances du prêt est abusive en ce qu’elle décharge l’assurance de son obligation en obligeant l’assuré, qui subit le sinistre pour lequel il est assuré, à exécuter, à sa place, son obligation ;
- d’autre part, qu’une clause du contrat d’assurance qui prévoit que la garantie prend fin à la date de déchéance du terme est abusive puisqu’elle permet à l’assurance de se libérer de ses obligations en raison de la survenance d’un événement, la déchéance du terme, qu’elle peut elle-même provoquer.
Les juges du fond ont rejeté l’argumentaire de l’emprunteur. La Cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel et a donc donné raison à la compagnie d’assurance en s’appuyant sur les termes de l’article L. 132-1 alinéa 7 du code de la consommation (devenu l’article L. 212-1 alinéa 3) :
« L’appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible ».
Selon la Cour, « la clause prévoyant la cessation de la garantie et des prestations à la date de la déchéance du terme définit l’objet principal du contrat en ce qu’elle délimite le risque garanti, de sorte qu’étant rédigée de façon claire et compréhensible, elle échappe à l’appréciation du caractère abusif des clauses ».
Cette décision a été rendue dans la droite ligne de la jurisprudence en matière de clauses prévoyant la fin de la garantie en cas de déchéance du terme. En effet, il a déjà été jugé que la déchéance du terme d’un prêt garanti par un contrat d’assurance décès-invalidité n’emporte pas, du seul fait de l’exigibilité immédiate, l’extinction du contrat d’assurance sauf stipulation contraire (Cass. 1ère civ. 26 avril 2000, n°97-20.238). En revanche, s’agissant de la seconde clause, la Haute juridiction statue pour la première fois sur ce point.
En droit de la consommation (article L. 212-1 du code de la consommation), ni d’ailleurs en droit commun des contrats (article 1171 du code civil), il ne faut donc pas perdre de vue que l’appréciation du caractère abusif des clauses ne peut jamais porter ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix à la prestation.
Or, en l’espèce, la délimitation du risque assuré concerne directement l’objet principal du contrat d’assurance. Dès lors, si la clause est rédigée de manière claire et compréhensible, elle ne saurait faire l’objet d’un contrôle du caractère abusif par les juges du fond.