Par décision du 15 février 2017, la Cour d’appel de Paris a retenu que la rupture du contrat de franchise était intervenue aux torts exclusifs de la société franchisée, et condamné cette dernière à payer à la société Buffalo Grill une somme de 40 000 euros à titre d’indemnité contractuelle de rupture de contrat. Dans ce dossier, le dirigeant, personne physique, n’était pas partie au contrat de franchise et il semble que le contrat de franchise Buffalo Grill ne contenait pas de clause de non-concurrence à la charge du franchisé. La société franchisée reproche donc à la Cour d’appel de l’avoir tenue responsable des actes de son dirigeant, tiers au contrat, alors que ceux-ci n’avaient pas été commis en son nom et pour son compte, et de lui appliquer une obligation de non-concurrence qui ne ressort pas des termes du contrat de franchise.
Malgré ces deux arguments forts, la Cour de cassation rejette le pourvoi sur ces arguments et confirme la décision de la Cour d’appel. Sur le point que le franchisé ne peut être tenu des agissements de son dirigeant, personne physique, la Cour oppose que le contrat de franchise stipulait qu’il était conclu intuitu personae, en considération de la personne du dirigeant, « expressément qualifié de « partenaire » ». Sur l’absence de stipulation expresse d’une clause de non-concurrence pendant la durée du contrat, la Haute juridiction retient que l’impossibilité pour les partenaires du franchiseur, pendant l’application de ce contrat, de créer, fût-ce via une société tierce, un restaurant entrant en concurrence avec ceux du réseau franchisé doit être déduite des stipulations contractuelles selon lesquelles :
- la société Buffalo Grill s’était réservée la possibilité de refuser le transfert du contrat à une personne exploitant déjà un réseau de restaurants concurrents, une telle circonstance étant constitutive d’une incompatibilité grave,
- si l’article 18.3 permettait au franchisé de continuer à exercer une activité de restauration, cette possibilité n’était prévue qu’à l’expiration du contrat.
En définitive, la Haute juridiction retient que la Cour d’appel, « qui a fait ressortir l’existence d’une situation incompatible avec l’exécution loyale du contrat par la société franchisée, a pu, sans porter atteinte à la substance ou à l’étendue des droits et obligations des parties, retenir que la résiliation du contrat pour faute grave était justifiée ».
De prime abord, cette décision peut paraître surprenante en l’absence de clause expresse de non-concurrence dans le contrat de franchise. Cependant, cette décision peut être saluée à plusieurs égards :
- elle admet, malgré le contexte particulier de la franchise, le déséquilibre présumé du rapport de force entre les cocontractants, le fait que le franchiseur soit (très probablement) le rédacteur du contrat de franchise, que le franchiseur puisse se prévaloir d’obligations ne ressortant pas expressément du contrat mais de la commune intention des parties,
- elle donne la prime à la bonne foi dans l’exécution du contrat dans le cas d’espèce.
Si cette décision paraît particulièrement opportune dans le cas d’espèce, il est très fortement recommandé aux franchiseurs de sécuriser leurs contrats en prévoyant une clause de non-concurrence en bonne et due forme pendant l’exécution du contrat et postérieurement (lorsque les conditions de validité d’une telle clause sont réunies).