L’absence de mention des franchisés dans certaines rubriques essentielles du site internet du franchiseur démontre le manquement de ce dernier à son obligation contractuelle de fournir un site efficace et performant.
Deux sociétés exploitées par un même gérant sont franchisées d’un réseau de franchise d’agences immobilières en vertu de contrats de franchise des 29 février 2008 et 11 septembre 2008, respectivement pour une durée de 7 années et 5 années.
Par lettres recommandées des 4 mars et 13 juin 2013, le franchiseur a notifié aux sociétés franchisées le non renouvellement des contrats, avec effet respectivement au 10 septembre 2013 et 28 février 2015. Les sociétés franchisées ont contesté le non-renouvellement de leur contrat, et ont débuté des négociations avec le franchiseur, lesquelles n’ont cependant pas abouti.
Par acte du 2 janvier 2015, les sociétés franchisées et leur gérant ont fait assigner le franchiseur devant le tribunal de commerce de Nanterre en réparation de leurs préjudices du fait du manquement à leurs obligations contractuelles (notamment violation du territoire contractuel d’implantation, et violation de l’engagement de synergie).
Elles sollicitaient alors le paiement de diverses sommes pour un montant de près de 2 millions d’euros, dont des manques à gagner sur la vente, la location et la gestion immobilière du fait du non-respect des territoires d’implantation.
Par jugement du 21 avril 2017, le tribunal de commerce de Nanterre a notamment dit n’y avoir lieu à statuer sur la demande relative au non-renouvellement des contrats de franchise, et débouté les sociétés franchisées et leur gérant de leurs demandes indemnitaires.
Le 22 mai 2017, les sociétés franchisées et leur gérant ont interjeté appel du jugement du tribunal de commerce de Nanterre.
Les demandes des sociétés franchisées et de leur gérant à l’encontre du franchiseur étaient notamment les suivantes :
- le remboursement des frais de pose d’enseigne,
- l’indemnisation du fait d’une violation des zones d’exclusivité territoriale,
- le constat de la violation par le franchiseur du principe de synergie et de l’obligation d’assistance,
- le constat de la violation par le franchiseur de l’obligation de développés des outils informatiques performants et un site internet efficace sous son nom.
Dans la présente décision du 3 juillet 2018, la Cour d’appel de Versailles déboute les appelantes de leurs demandes sur les trois premiers chefs ci-dessus.
S’agissant de la demande relative au site internet du franchiseur, la Cour adopte le raisonnement ci-après. Le franchiseur a pris l’engagement contractuel de faire figurer sur son site une mention informant les clients de l’adresse du franchisé, mais également, de manière plus générale de transmettre un savoir faire couvrant : « une communication efficace (…), des outils informatiques performants, un site INTERNET efficace, au nom de domaine du franchiseur, qui permet au franchisé de proposer à la clientèle tout ou partie de ses biens à vendre et à louer ».
Or la Cour constate « qu’un site Internet qui ne mentionne les agences franchisées que dans une rubrique générale, mais omet étrangement de les faire figurer dans les rubriques spéciales « vendre » ou « faire gérer », vers lesquelles se dirigent directement certains clients ne constitue manifestement pas un « outil performant » et un site « efficace », en ce sens qu’il risque d’aboutir à la perte de certains clients se dirigeant vers les agences intégrées seules mentionnées dans les rubriques spéciales ».
La Cour observe au surplus que cette perte de clients devait se faire au profit des agences intégrées, alors même que le franchiseur axe sa communication à destination des candidats à la franchise sur le slogan « pas de différence de traitement entre le réseau intégré et le réseau franchisé », « ce qui dénote une particulière déloyauté dans les relations franchiseur/franchisé ».
Par conséquent, la Cour retient que l’absence de mention des franchisés dans certaines rubriques essentielles du site internet du franchiseur démontre le manquement de ce dernier à ses obligations contractuelles, et notamment à l’article du contrat promettant un site efficace et performant.
Cela étant précisé, alors que la Cour établit la faute du franchiseur, elle rejette la demande indemnitaire des appelantes faute pour elles de justifier du préjudice invoqué.