1/ Elle est limitée par la règle posée par l’article L. 145-8 alinéa 2, du Code de commerce selon laquelle le locataire ne peut prétendre au renouvellement de son bail que si le fonds a fait l’objet d’une exploitation effective au cours des trois années qui ont précédé la date d’expiration du bail ou de sa reconduction.
En effet, le locataire en place qui aura modifié l’activité exercée dans les lieux en se prévalant de la clause « tous commerces » pourra, en l’état actuel du droit positif, se voir refuser le renouvellement du bail s’il n’exploite pas cette nouvelle activité depuis trois ans. Cette règle s’applique alors même que la transformation a été, par définition, parfaitement régulière. Cette situation paradoxale peut être très cruelle pour le preneur, qui peut se voir refuser le renouvellement du bail, sans indemnité !
2/ La clause « tous commerces » s’accompagne souvent d’une clause interdisant la cession sauf à l’acquéreur du fonds.
Il en résulte que le changement d’activité ne peut être réalisé que par l’exploitant en place et non pas en vue d’une cession.
Le preneur exploitant pourra exercer dans les lieux l’activité qu’il souhaite et la modifier en cours de bail. Mais s’il cède, la cession devra porter sur le fonds exploité à l’époque de la cession, l’acquéreur pouvant ensuite, après avoir acquis le fonds, exercer l’activité de son choix en le transformant. Cela vaut aussi pour la cession de la totalité des parts sociales du preneur, qui peut être requalifiée en cession de droit au bail (par exemple : Cour d’appel Toulouse 4 octobre 2011).
La Cour d’appel de Rouen dans un arrêt en date du 16 avril 2009 (N° Rôle 08/01217) a clairement rappelé ce principe :
« Si en effet la clause « tous commerces » permet au preneur de changer d’activité pendant le cours du bail, la clause figurant dans le bail n’y fait nullement obstacle mais permet au bailleur d’exercer un contrôle sur l’activité de l’acquéreur du droit au bail et notamment ainsi sur les transformations nécessitées par cette activité.
Cette clause dispose que en effet que le locataire « ne pourra, dans aucun cas et sous aucun prétexte, céder son droit au présent bail ni sous-louer en tout ou partie les locaux loués sans le consentement exprès et par écrit du bailleur ». Or, malgré l’opposition exprimée par écrit par le bailleur à la cession et adressée à Maître X es qualités le 23 mars puis le 30 mai 2006, celui-ci a passé outre en signant l’acte notarié nonobstant les dispositions du bail prévoyant l’autorisation du bailleur. Il s’ensuit que l’acte de cession du bail est inopposable au bailleur. ».
La clause restreignant la libre cession du droit au bail au seul successeur dans le fonds vient donc relativiser considérablement la portée de la clause « tous commerces », dont le principal intérêt est l’extrême liberté qu’elle confère au locataire, notamment, en cas de cession de son droit au bail.
Retenons donc qu’en présence d’un bail commercial « tous commerces », tout changement d’activité doit être effectué au moins trois ans avant le renouvellement, et qu’en présence d’une clause réservant la liberté de cession au repreneur du fonds, il faudra céder le droit au bail avec le fonds exploité. Le cessionnaire pourra modifier cette activité, à condition que l’opération ne soit pas assimilable à une fraude aux droits du Bailleur. Cela relativise donc la portée du bail « tous commerces » !
Articles complémentaires :
Ce qu’il faut savoir avant de négocier un bail commercial.
Quel bail choisir pour votre franchise ?
Par Philippe MARIN, Avocat-expert de l’IREF.
Société d’avocats I, M & Associés, Toulon, Paris.