Le franchiseur peut imposer au franchisé un droit de préférence en cas de cession de son fonds de commerce, la Cour de cassation considérant qu’il ne restreint pas artificiellement la concurrence par principe.
Pour approfondir
Dans les réseaux de distribution, le droit de préférence – ou encore droit de préemption – constitue une forme de droit de priorité accordé à la tête de réseau, lui permettant d’intervenir en cas de cession par l’adhérent de tout ou partie de ses actifs ou de ses droits.
Cette clause porte généralement sur le fonds de commerce de l’adhérent, son droit au bail, ou encore sur les participations de la société distributrice.
Un franchisé d’un réseau de distribution alimentaire était tenu, dans le contrat de franchise, par une clause de préférence au bénéfice du franchiseur. Cette clause prévoyait un droit de première offre et de préférence, à égalité de prix et de conditions, en particulier en cas de cession des droits sur le local dans lequel le franchisé exploitait son activité, ou du fonds de commerce (y compris en cas de mise en location-gérance).
Avant d’avoir interrogé son franchiseur, le franchisé a conclu un accord pour la cession de son fonds de commerce avec un réseau concurrent.
L’accord ne prévoyait pas, comme le veut l’usage en la matière, de condition suspensive relative à la levée du droit de préférence du franchiseur (la condition suspensive qu’il contenait portait sur la conclusion d’un contrat de gérance-mandat au profit d’une personne physique).
Considérant son droit de préférence violé, le franchiseur s’est opposé à cette cession et a introduit une action judiciaire en vue de voir interdire la vente ou, si celle-ci intervenait, de régulariser la vente à son profit (en lieu et place de son concurrent). Le franchisé et le franchiseur concurrent ont, malgré la procédure en cours, poursuivi la cession du fonds de commerce et le franchisé a cherché à faire annuler la clause de préférence qui lui était opposée par son franchiseur.
L’Autorité de la concurrence avait en effet soulevé, notamment dans un avis n°10-A-26 du 7 décembre 2010, des préoccupations de concurrence s’agissant de ces clauses de préférence lorsqu’elles sont insérées dans les contrats du secteur de la grande distribution alimentaire, dans la mesure où elles participeraient à la faible mobilité des magasins entre les enseignes et restreindraient donc de ce fait la concurrence.
Le franchisé soutenait que l’appréciation de la validité de la clause de préférence devait être réalisée in concreto, notamment en considération de l’ensemble des clauses contractuelles insérées dans le contrat de franchise concerné, et plus particulièrement des clauses de non-concurrence et de non-ré-affiliation qu’il contenait. Dans l’affaire commentée, la Cour de cassation – confirmant la position de la Cour d’appel – juge qu’en l’espèce, la clause de préférence était valable, et le justifie notamment par le recours au système de la franchise. En effet, la Cour de cassation confirme que le franchisé ayant pu bénéficier d’un partenariat commercial solide, cela justifiait que le franchiseur puisse en retour sécuriser ses investissements pendant plusieurs années, en empêchant l’appropriation des effets commerciaux favorables de ce partenariat par un concurrent.
Considérant que le franchisé n’apportait par ailleurs pas la preuve de l’existence d’une restriction artificielle de la concurrence par la clause de préférence, la Cour de cassation valide cette dernière et rejette donc les demandes du franchisé.
A rapprocher : Cass. com., 3 mai 2018, n°16-27.926