Créer une entreprise c’est faire de la R&D, pour imaginer une offre originale, développer un habillage marketing, pour créer de la confiance, et tisser un réseau de distribution.
Ces étapes nécessitent une part croissante d’investissements immatériels qui augmentent d’autant le risque initial. Pour l’Etat, créer une entreprise c’est donner naissance à une personne morale qui va avoir des droits et des devoirs. Les mesures qui se succèdent en faveur de la création d’entreprise visent à faire des réglages pour rendre les droits attractifs, au regard de devoirs toujours plus opaques.
Or, au vu des résultats, la solution n’est pas dans les réglages. Elle est dans la répartition du risque entre le créateur, qui a 15 % de chance de devenir un homme heureux, et la communauté, qui a besoin du développement de ses entreprises. Ce partage doit se faire en plusieurs points. Créer une entreprise en France implique de renoncer à la protection sociale auxquels les Français sont attachés depuis leur premier emploi.
La tranche 40- 50 ans est la plus performante en matière de création d’entreprise. A cet âge le candidat est encore chargé de famille. Son renoncement relève de l’héroïsme.
L’homme politique n’est pas sensible à ce frein car il y est lui-même durement exposé. Le traitement de ce problème ne peut venir des syndicats, gestionnaires des organismes paritaires, car les protections sont destinées aux salariés et non aux patrons. Or le Medef n’est pas réceptif à ce problème, ni à ses répercussions.
Les financiers ne prêtent pas volontiers. Il est vrai que les dossiers qui leur sont soumis ne sont pas de très bonne qualité, préparés avec peu de moyens et portés par des créateurs insolvables. C’est donc au niveau de la sélection des projets que les actions doivent être menées. Actuellement, le porteur d’un projet n’a pas accès aux études qui lui seraient précieuses. Chacun doit imaginer les données nécessaires à l’élaboration de son business plan. La mise en place des incubateurs est un bon point de départ.
Les mesures de simplification qui ont été récemment mises en place concernent la création de la personne morale. Pour le reste, chaque créateur fait son parcours… Eliminer le maquis des aides, distribuées par des fonctionnaires, au profit d’une matrice de compétences mettant en synergie les intérêts corporatistes et géographiques, permettrait à un vivier de candidats de structurer des projets et à la communauté (tant métier que locale) d’organiser des équipes porteuses de progrès et de développement. Or l’Etat ne se montre pas vraiment structurant quant aux objets des entreprises qui sont créées. Il ne s’agit pas de réclamer une économie planifiée, mais simplement une économie organisée.
Cependant, tout ne doit pas venir de l’Etat. En France, l’absence d’intérêt des corporations pour leurs jeunes pousses est frappante. Aussi longtemps que nos syndicats professionnels seront centrés sur le droit du travail et la réglementation, notre tissu entrepreuneurial sera fragile. Les bonnes pratiques à travers les âges ont montré que les corporations qui s’occupent de leur renouvellement s’en sortent mieux que les autres.
D’après Geneviève Bouché, chef d’entreprise et docteur es-sciences des organisations, auteur de « Je vais monter ma boîte » (Editions d’Organisation)