Le deuxième parfumeur d’Europe, derrière Douglas, fait encore circuler des notes manuscrites et porte des bretelles. Il a surtout pour règle d’or d’apporter un vrai conseil à ses clients dans un réseau de parfumeries à bas prix.
Marionnaud représente 1,15 milliard de chiffre d’affaires en 2002 avec un bénéfice net qui, en 2001, lui avait assuré une progression de 62 %. C’est aussi une entreprise qui emploie 7 000 personnes, dont 4 000 en France. Or l’actuel dirigeant de Marionnaud prétend être parti avec un investissement de 100 000 francs en 1984 pour acheter une parfumerie tenue par sa femme et une amie à Montreuil-sous-Bois…
L’histoire est simple, comme les ponts ont été rapidement rompus avec l’associée de sa femme, Marcel Frydman a pris les rênes et assuré le développement de l’enseigne grâce à sa seule expérience de petit commerçant. Il est maintenant à la tête de 1200 points de vente dans 13 pays d’Europe. L’entreprise a certes été restructurée en fonction de cette croissance mais, avant tout commerçant, il n’a pas fondamentalement changé sa manière de diriger le groupe. Il prend pratiquement toutes les décisions lui-même, il faut sa griffe pour valider toutes les opérations, grandes ou petites. Il se tient au courant des ventes de toutes les boutiques, chaque jour. Il est proche de ses collaborateurs et de ses conseillères qui l’appellent ou viennent le voir, lui confient leurs soucis professionnels ou personnels. Il est connu pour ses capacités de négociateur et maîtrise la solution gagnant-gagnant.
Marcel Frydman est aussi un visionnaire, il a été le premier à sentir le marché de la parfumerie à prix cassés et, en 1996, s’est porté acheteur de l’enseigne Marionnaud, alors que ses boutiques s’appelaient simplement La Parfumerie. L’intuition a été bonne : le seul changement de nom a fait croître immédiatement le chiffre d’affaires des boutiques. Devant le succès rapide de la carte de fidélité, il a également réagi très vite, en permettant à ses clients de recevoir un bon d’achat chez eux. Aujourd’hui 4,5 millions de françaises ont la carte, soit un foyer sur quatre. Mais parfois l’intuition peut ne pas être bonne conseillère et à la fin de l’année 2002, il a dû rectifier son point de vue face aux efforts promotionnels de ses concurrents, alors qu’il avait refusé de baisser les prix.
Ce commerçant expérimenté n’oublie pas de surcroît qu’un point de vente dépend de la motivation de ses vendeurs. Aussi mène-t-il une vraie politique sociale, en France par exemple, profitant des aides de la Loi Aubry, il a accordé à tout le personnel la semaine de quatre jours à raison de 33 heures hebdomadaires. Il sait par ailleurs trouver le collaborateur qui convient. Il le repère facilement dans les réseaux qu’il reprend. Il est réputé être toujours d’humeur égale, avec des qualités humaines reconnues et un franc parler. C’est avec ses deux fils, probables repreneurs du réseau, qu’il a certainement le plus de connivence, mais aujourd’hui il reste encore seul maître à bord.
Dominique Deslandes