L’arrêt du 3 juillet 2002 se rapporte d’ailleurs à l’un de ces deux arrêts. Qui plus est, la Cour de cassation s’est prononcée catégoriquement dans le même sens dans un arrêt du 27 mars 2002 que nous avions commenté dans La Lettre de la FFF, n° 137 de mai 2002.
L’intérêt de l’arrêt du 3 juillet 2002 est, outre de permettre à la Cour d’appel de Paris de réaffirmer la position qu’elle a adoptée le 4 octobre 2000, le fait que la Cour procède à une analyse du contrat de licence liant franchiseur et franchisé avant de réaffirmer sa position.
– les prix de vente du franchisé à sa clientèle : certes, le franchisé reçoit des préconisations en la matière mais il reste libre de déterminer ses prix. La Cour rappelle qu’il est de l’intérêt même du franchisé de ne pas trop s’écarter des prix généralement pratiqués par le franchiseur pour ses propres stations et chez les autres franchisés. Qui plus est, pour les opérations de groupe, le franchiseur ne peut imposer au franchisé de traiter aux conditions préférentielles convenues ;
- le franchiseur exerce un contrôle constant sur l’activité du franchisé ; le franchisé doit communiquer régulièrement ses données commerciales, financières et comptables. La Cour ne voit dans ces dispositions que « l’expression normale de l’interdépendance entre franchiseur et franchisé » ;
- revenant sur le thème du risque qui a été mis en avant par la Cour Suprême, la Cour d’appel de Paris souligne que si l’obligation est faite au franchisé de communiquer des informations au franchiseur, ce n’est pas parce que le franchiseur assume les risques pris par sa franchise, « mais au contraire pour en prévenir les effets à son égard en cas de baisse anormale du chiffre d’affaires soumis à redevances en résiliant si nécessaire le contrat » ;
- un sondage a été effectué auprès des clients du franchisé d’où il résultait que les clients primaient l’entrepreneur franchisé sur le franchiseur;
- enfin, le contrat rappelait que le franchisé agissait en qualité de prestataire indépendant, de telle sorte que franchiseur et franchisé agissaient chacun sous leur propre responsabilité et leurs propres risques.
Dès lors, la Cour qui rappelle les termes du principe posé dans ses arrêts du 4 octobre 2000 conclut tout logiquement que le franchisé exploite bien un fonds de commerce qui lui appartient et bénéficie du statut des baux commerciaux. Au-delà de ce cas d’espèce, il nous semble que la Cour d’appel a entendu tout à la fois examiner les termes du contrat de franchise mais aussi examiner sa mise en uvre effective.
En outre, la Cour a entendu analyser la finalité des dispositions contractuelles pour la confronter à la finalité de la franchise.
On peut en conclure que le franchisé est bien propriétaire de sa clientèle et peut donc bénéficier de la propriété commerciale dès lors que le contrat et sa mise en oeuvre sont bien cohérents par rapport à la finalité de la franchise que l’on peut ainsi présenter dans cet arrêt : franchiseur et franchisé sont deux entreprises indépendantes, chacune assumant le risque commercial en grande partie distinct du risque assumé par l’autre partie. L’ensemble comporte une interdépendance normale entre franchiseur et franchisé. Le franchiseur se doit de veiller aux bonnes conditions d’exploitation par chacun de ses franchisés.
Par le regretté Yves Marot Juriste collège des Experts de la FFF (31/10/2002)