Le nouveau règlement sur la distribution d’automobiles révèle, à l’usage, certains effets pervers qui vont à l’encontre des souhaits de Bruxelles.
Selon le London Economics Institut chargé par la Commission Européenne de mener une enquête sur les conséquences de l’application du texte européen, l’un de ces effets dont l’automobiliste consommateur pourrait faire les frais est la diminution du nombre de points d’après-vente officiels. Cette étude analyse l’évolution de la distribution dans douze états membres. Entre 1998 et 2004, le nombre d’ateliers aux couleurs des constructeurs dans l’Union des 25 pays membres s’est érodé de 119 000 à 97 000. Soit une contraction de 18 %. En France cette réduction atteint 23 %, le nombre de points de service tombant de 22 600 à 17 500, notamment du fait de la disparition d’agents.
L’essor des chaînes de réparation compense en partie cette érosion. Néanmoins les garagistes indépendants peinent pour accéder aux informations techniques et se tournent vers les concessionnaires afin d’obtenir certaines données. En contrepartie ils doivent se fournir chez eux en pièces de rechange, souvent plus chères. A long terme les petits réparateurs indépendants ne devraient pas survivre. Pourtant en termes de qualité ils sont souvent plus performants. Le secteur de l’après-vente est devenu stratégique.
Selon l’étude, 17,6 % des concessionnaires envisageraient d’implanter un nouveau magasin d’exposition dans leur pays et 5,9 % un point de livraison. Ils ne sont que 2 % à vouloir tenter l’aventure dans un autre état de l’Union en ouvrant un site. Censée intensifier la concurrence entre les distributeurs d’une même marque, la clause d’essaimage n’a pas provoqué la révolution espérées par les libéraux et redoutée par les constructeurs. Alors que les concessionnaires et les agents peuvent s’approvisionner en pièces d’origine chez les équipementiers plutôt que chez leur constructeur. Or très peu ont saisi cette opportunité car en plus du manque d’informations, un manque de marketing, il est avéré que les primes de constructeurs dissuadent les concessionnaires de chercher ailleurs les pièces. D’ailleurs tout est fait pour maintenir la relation entre constructeurs et concessionnaires : les pièces sont maintenues à bas prix et les systèmes informatiques ne permettent pas de passer commande ailleurs que chez le constructeur.
En fait dans ce secteur les choses évoluent lentement. Un phénomène peu visible pour l’automobiliste est constaté : les succursales de constructeurs se multiplient en Europe de l’Ouest. Leur nombre a plus que doublé au Royaume Uni et enregistre une forte croissance en Allemagne et en France, pays où leur nombre est déjà important.
Si Bruxelles attendait un essor multimarque et une intensification de la concurrence, associés à un développement des primes de qualité dans la rémunération des concessionnaires, en fait on constate un certain nombre de dérives. Ainsi l’implantation des marques asiatiques se trouve facilitée, les investissements nécessaires pour être agréé distributeur subissent une augmentation significative et on observe l’accroissement du nombre des grands groupes tandis que le nombre des distributeurs est en tassement. En même temps il y a une stagnation des ventes sur internet, une diminution de la densité des ateliers aux couleurs des grandes marques et un petit nombre de pièces achetées par les concessionnaires comme dit plus haut.
Dominique Deslandes