Le franchiseur peut-il facturer plus cher que la concurrence ?

  • Créé le : 18/07/2016
  • Modifé le : 17/03/2020

Lorsque le franchiseur est également le fournisseur des franchisés, il se crée entre eux une relation juridique d’acheteur/vendeur. Or, dans le cadre d’une telle relation, rien n’oblige le vendeur à pratiquer des prix compétitifs. Il est libre de proposer les prix qu’il souhaite et l’acheteur est libre de ne pas acheter.

Cette liberté est toutefois relativisée si l’acheteur est obligé (contractuellement) de s’approvisionner auprès du franchiseur. D’une part le franchiseur va devoir justifier de la validité de la clause d’approvisionnement exclusif. D’autre part, en matière de franchise, la nature même de la relation impose au franchiseur de ne pas nuire à l’économie de l’entreprise du franchisé.

I. Validité de la clause d’approvisionnement exclusif

D’une manière générale, une exclusivité d’approvisionnement ne peut être imposée au franchisé que si elle est justifiée par l’image de la marque et l’identité du réseau.

La clause sera ainsi justifiée si elle porte notamment sur des produits ou des services spécifiques au réseau. Ces produits ou services peuvent alors légitimement être imposés aux franchisés parce qu’ils sont nécessaires au fonctionnement du réseau ou qu’ils l’identifient aux yeux des consommateurs.

Cette conclusion résulte tant des décisions rendues par le Conseil de la Concurrence (aujourd’hui Autorité de la Concurrence) qui s’était plusieurs fois prononcé sur la question, que des décisions rendues par les juridictions de l’ordre judiciaire, Cour de cassation en tête.

A titre d’exemple, retenons qu’une décision de la Cour de cassation du 2 juillet 2002 (n°00-14.939) a considéré qu’une obligation d’approvisionnement exclusif pour une franchise de vins et spiritueux « n’était pas nécessaire au maintien de l’identité commune ou à la réputation du réseau et que, compte tenu de la nature des produits, il était possible d’appliquer des spécifications objectives de qualité ». En résumé, le franchiseur était en droit de définir les qualités et caractéristiques des produits vendus sous son enseigne. Ces qualités et caractéristiques participaient à l’identification du réseau. En revanche, il n’avait aucune légitimité à imposer un ou plusieurs fournisseurs dès lors que les franchisés respectaient la qualité des produits qu’ils achetaient.

Important : Si les produits ne paraissent pas de nature à identifier le réseau dont un franchisé est affilé. Dans ce cas, le franchisé est alors libre de s’approvisionner auprès des fournisseurs de son choix.

II. Préservation de l’économie de l’entreprise franchisée

Rappelons que la relation de franchise se caractérise notamment par l’obligation, pour le franchiseur, d’apporter assistance au franchisé, tout au long du contrat. Il serait donc paradoxal que le franchiseur, qui supporte cette obligation d’aide et de conseil, puisse dans le même temps compromettre la bonne marche de l’entreprise du franchisé, en lui imposant des coûts d’approvisionnement anormaux.

La jurisprudence confirme cette logique. La pratique de prix anormalement élevés peut constituer un abus susceptible d’être sanctionné par les Tribunaux.

On citera à titre d’exemple un arrêt rendu par la Cour d’appel de Toulouse le 11 décembre 2007. Dans cette décision, les juges refusent de condamner le franchiseur. On comprend toutefois, à la lecture des réserves qu’ils expriment que la condamnation aurait été possible si les conditions du dossier avaient été différentes.

Ainsi, les juges soulignent que « il n’est pas possible de caractériser un abus dans la fixation des prix alors que le franchisé n’était pas lié par une clause d’approvisionnement exclusif, qu’il pouvait au moins pour partie s’adresser à d’autres fournisseurs et que donc il n’était pas totalement dépendant du franchiseur ». On comprend donc bien que le franchisé qui serait lié par une clause d’approvisionnement exclusif, pourrait dénoncer les éventuels abus du franchiseur.

La Cour poursuit : « l’abus au cas précis peut d’autant moins être retenu que la preuve n’est pas rapportée d’un profit illégitime ni de l’impossibilité pour les franchisés, en l’état des tarifs pratiqués par la centrale d’achat, de réaliser un profit assurant le maintien de leur entreprise ». Là encore, on doit comprendre que si les franchisés sont en mesure de démontrer que le franchiseur tire des ventes un profit illégitime (une marge excessive par exemple), susceptible de compromettre la bonne marche de l’entreprise des franchisé, ce comportement peut donner lieu à sanction.

En conclusion, il convient avant tout de s’assurer que son dossier correspond bien aux critères d’appréciation évoqués ci-dessus. Si tel est le cas, tentez de négocier avec votre franchiseur.

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