Chacune des parties a, par échanges de courriers, pris des engagements à l’égard de son partenaire. Dans la mesure toutefois où l’un de ces engagements n’a pas été clairement défini, la Cour de cassation a considéré que les négociations n’avaient pas abouti et qu’aucun accord n’avait été conclu entre les parties. De ce fait, aucune des parties ne peut se prévaloir du non-respect, par l’autre partie, de l’engagement pris dans le cadre de ces échanges de courriers.
La société S, qui commercialise des articles de soins capillaires à destination des professionnels de la coiffure, a signé, le 26 septembre 2011, et pour une durée de cinq ans, un contrat de partenariat avec la société C, à la tête d’un réseau national de salons de coiffure.
Selon les termes du contrat, la société S s’est engagée à verser une aide au développement à la société C et cette dernière s’est engagée en contrepartie à assurer une promotion active des produits de la marque de la société S et à utiliser uniquement les produits de celle-ci au sein de son réseau. En juillet 2014, la société S met en demeure la société C de respecter ses obligations contractuelles et un mois après elle résilie le contrat aux torts de cette dernière. La société S assigne ensuite la société C aux fins d’obtenir notamment le remboursement des subventions versées durant le contrat dès lors que la résiliation anticipée du contrat était imputable à la société C. De son côté, la société C assigne son partenaire pour obtenir l’indemnisation du préjudice subi du fait de la fin des relations ; la société C reproche à la société S de ne pas avoir respecté les termes d’un « avenant » (résultant d’échanges de mails entre les parties), qui selon elle aurait été conclu entre les parties en mars et juillet 2013 et par lequel la société S se serait engagée à verser à la société C une « subvention exceptionnelle non remboursable » de plus de 5 millions d’euros. Il avait toutefois été convenu entre les parties qu’un accord devait être conclu entre les parties afin de formaliser cet accord et préciser les obligations respectives des parties (la société C devait quant à elle s’engager à vendre un volume minimum de produits de la société S sans que cet engagement ne soit, en l’état des discussions, précisément défini).
En première instance, le tribunal prononce la résiliation du contrat aux torts de la société C, rejette les demandes indemnitaires formées par cette dernière dès lors qu’il n’est justifié d’aucune faute imputable à la société S du fait de l’inexécution d’un avenant dont la réalité n’est pas démontrée, et condamne la société C à restituer les subventions reçues.
En appel, la cour d’appel confirme la condamnation de la société C à rembourser à la société S les subventions reçues de la part de cette dernière au cours du contrat.
C’est dans ce contexte que la société C a formé un pourvoi en cassation. La Haute Cour relève que des échanges sont intervenus entre les parties en mars et en juillet 2013 avec des engagements réciproques pris par chacune des parties : d’une part, le versement par la société S d’une subvention et, d’autre part, la commercialisation d’un volume minimum de produits par la société C.
La Cour de cassation relève cependant que l’engagement pris par la société C, concernant le volume minimum de produits à commercialiser, n’avait pas été clairement défini entre les parties, de sorte que les négociations n’avaient pas abouti et qu’un accord, ni même avenant ne pouvait être considéré avoir été conclu entre les parties.
La Cour a ainsi rejeté le pourvoi formé par la société C. Cet arrêt revient sur la position traditionnelle de la jurisprudence selon laquelle il ne peut y avoir contrat que lorsque les conditions de l’accord ont été clairement et précisément définies entre les parties. Un contrat ne peut en effet être considéré comme étant formé « sans constater qu’il y avait eu accord des parties sur toutes les conditions du contrat » (Cass. civ. 3ème, 17 juill. 1967, Bull. civ. III, n°299), et, à défaut d’accord, il convient de considérer que le contrat ne s’est pas formé (Cass. com. 26 févr. 1991, n°89-18.587 ; Cass. civ. 1ère, 5 mars 1991, n°89- 17.167). Par ailleurs, la jurisprudence relève que dès lors que certains éléments sont objectivement essentiels, ou subjectivement essentiels pour une partie, le défaut d’accord sur ces éléments en particulier fait obstacle à toute formation du contrat (Cass. com., 15 nov. 1994, n°92-19.931 ; Cass. civ. 3e , 2 mai 1978, n°76-14.465 ; Cass. civ. 1e , 21 février 1979, n°76-15.128 ; Cass. com., 16 avril 1991, n°89- 20697 ; Cass. civ. 1e , 24 nov. 1998, n°95-21.074 ; Cass. com., 13 mai 1980, n°78-15.136).
A rapprocher : Cass. com. 26 février 1991, n°89- 18.587